Note d’intention

Voici quelques années, je fus profondément émue à la lecture du livre «Là où vont nos pères» de Shaun Tan. Cette bande dessinée sans parole raconte l’histoire d’un homme qui a quitté sa famille et son pays pour travailler ailleurs. Il essaie d’en comprendre les usages de ce pays inconnu, de s’y adapter. Mais la tâche est ardue car il ne connait pas la langue, les codes du pays et les habitants ne le comprennent pas.
Comment partager un espace quand on a des habitudes différentes? Comment apprivoiser les codes culturels des uns et des autres? Pourquoi et comment interagir sereinement avec l’altérité? Comment trouver sa place quand on arrive dans un monde aux codes déjà fixés? Comment faire émerger la singularité de chacun et s’en nourrir? Comment vivre la différence?
J’ai ressenti la nécessité de partager ce questionnement avec des enfants et d’ouvrir le débat à ce sujet.
J’ai d’abord mené un atelier «Culture a de la classe» sur le sujet, dans l’école spécialisée du Parvis de Saint-Gilles, en partenariat avec la Commune de Saint-Gilles. Je fus épaulée par Gilles Abel qui a mené les ateliers philosophiques et Isabelle Darras qui a encadré le travail sur le théâtre d’objets.
J’ai recueilli des témoignages de jeunes enfants de l’école qui ont cherché ou cherchaient encore leur place dans notre société. Lors de ces ateliers, Johanne, bibliothécaire, a lu un livre jeunesse pour les tout-petits sur le sujet: «Monstre rose», d’Olga de Dios.

Sa lecture a recueilli un vif succès auprès des tout-jeunes enfants. Avec Isabelle Darras, nous avons décidé d’en explorer l’imaginaire lors des ateliers.
A la suite des ateliers, j’ai décidé d’adapter l’histoire dans un spectacle. L’enjeu était de proposer cette problématique, assez complexe, de manière nuancée, ludique, poétique et visuelle, pour des enfants de l’école maternelle et début primaire.
«Monstre rose» dépeint l’histoire d’un être qui cherche sa place, la place de sa singularité.
Nous sommes partis de cette histoire et avons inventé, développé le voyage du monstre rose, qui est décrit sommairement dans le livre de l’auteure. Partir de l’histoire d’Olga et voyager, traverser les contrées du sujet de manière poétique et imagée, en y inscrivant subtilement les difficultés d’adaptation que rencontrera le personnage.

Isabelle Colassin